Répertoire
Précisions sur le livret 2012
Les pièces sont issues des auteurs suivants :- Thurlough O’Carolan (1670-1738)
- Orchésographie, par Thoinot Arbeau
- Jean-Baptiste André Bonaventure Dupont (1765-1841)
- Ioannes de Gruyters, carillonneur à Anvers (publié en 1715)
- Chansons populaires de Pays de Vannes, Loeiz Herrieu et Maurice Duhamel (1930)
Turlough O'Carolan, harpeur et poète Irlandais, avait coutume d'écrire la musique avant le texte, en opposition avec la pratique habituelle en Irlande. Cependant Carolan estimait que la poésie avait toujours préséance sur la musique. Il combinait à merveille les deux grands courants musicaux de son époque, la musique classique et la musique populaire, se laissant influencer par les uns et les autres. Il intégra dans ses compositions des éléments de musique baroque inspirés de Vivaldi et de Corelli. On sait qu'il fut un grand admirateur de Geminiani qu'il rencontra presque certainement à Dublin lors de l'un des séjours du compositeur italien, en 1734 et en 1737. D'après la tradition orale, un concours de composition aurait été organisé, O'Carolan le remportant avec une pièce que l'on titra « O'Carolan's Concerto », qui n'a bien entendu de concerto que le nom.
Une seule copie de sa musique nous est restée, sous forme d'un recueil d'airs ne comportant que la ligne mélodique. On ne sait donc pas de quelle manière il accompagnait ou harmonisait ses compositions. Il écrivit de nombreux airs en hommage à ses hôtes et mécènes, qu'il nommait « planxty ». Le terme a été repris par le groupe irlandais Planxty.
Il a composé au moins 220 airs, dont beaucoup sont encore joués aujourd'hui. Son œuvre constitue donc la collection la plus complète de musique issue des plus anciennes traditions harpistes.
Thoinot Arbeau (Jehan Tabourot) est un compositeur et écrivan de Langres. Parmis ses ouvrages, le plus connu est sans conteste « Orchésographie ou Traicté en forme de dialogue par lequel toutes personnes peuvent facilement apprendre & practiquer l'honneste exercice des dances. », le corpus le plus complet des danses pratiquées au XVIe siècle. C'est aussi et surtout le premier manuel de danse qui indique avec précision les pas à exécuter en regard de la partition musicale. C'est également la première méthode de tambour publiée au monde.
Cet ouvrage, qui fait encore référence en danse renaissance, a pour but avoué d'apprendre aux jeunes gens (sous-entendu de bonnes familles) les pas et les convenances qui seyent aux danseurs. À l'exception de la basse danse — qui est alors « hors d'usage depuis quarante ou cinquante ans » —, le répertoire décrit par Arbeau se différencie singulièrement des danses pratiquées au Moyen Âge et jusqu'au siècle précédent. Le répertoire de l’Orchésographie paraît donc « jeune » et, en tous cas, récemment introduit dans une certaine classe moyenne française.
Outre décrire avec exactitude nombre de pas ainsi que leurs fioritures, l'auteur utilise un procédé novateur : la pédagogie. En effet, Capriol, un jeune homme courtois mais inexpérimenté dans l'art de la danse, suit les conseils de son précepteur Arbeau : Capriol pose des questions, Arbeau y répond. Parfois même Capriol se trompe dans l'exécution ou la compréhension des différents branles, pavanes etc., ce qu'il s'empresse de corriger car Capriol le dit lui-même dans l'introduction de l’Orchésographie : « J’ay prins plaisir en l'escrime & jeu de paulme, ce qui me rend bien voulu & familier des jeusnes hommes. Mais j’ay deffault de la dance pour complaire aux damoiselles, desquelles il me semble que depend toute la reputation d’un jeusne homme à marier ».
Jean-Baptiste André Bonaventure Dupont, carillonneur à Saint-Omer (en Flandre Française), nous a légué un patrimoine très précieux, bien que presque inconnu. Il a passé sa jeunesse à noter sur des morceaux de calepin des airs, qu'il entendait, et lui plaisaient. Plus tard regroupés dans un ouvrage manuscrit, perdu, puis retrouvé, ce livre est aujourd'hui réédité et redécouvert.
En comparaison avec d’autres instruments, l’histoire n’a laissé que très peu de matériel musical pour le carillon. La musique de carillon la plus ancienne que l’on possède remonte au 18e siècle.En ce qui concerne la période qui va de l’apparition du carillon en tant qu’instrument de musique (fin du 15e siècle) aux plus anciens documents retrouvés, les seules sources dont on dispose sont des descriptions littéraires de ce répertoire qui ont été faites plus ou moins par hasard.
Le répertoire de Dupont présente toute fois davantage de morceaux de genre. Le carillonneur s’est largement inspiré de la musique profane de son temps. Bien que son carillon se soit trouvé dans une abbaye, une partie importante de son livre de musique est composée d’extraits d’opéras et de danses. L’opéra français, en particulier l’opéra-comique, connut ses heures de gloire durant la deuxième moitié du 18e siècle. Dupont y a sans doute pris part indirectement.
Ainsi, si Dupont jouait de la musique religieuse, il s’inspira également de la musique populaire d’opéra et de danse de son époque.Cette musique de divertissement de la haute bourgeoisie et l’aristocratie était encore fort éloignée de la musique populaire qui devait constituer plus tard une grande partie du répertoire des carillonneurs. Quoi qu’il en soit, les airs sonnés par la tour de l’abbaye de St-Omer, quelques années avant que cette puissante abbaye ne soit détruite sous la Révolution Française, ne consistaient pas uniquement en airs « pieux »…Derrière les murs de l’abbaye, les derniers moines auront pu apprécier cette musique profane grâce aux sons du carillon !
Johanes De Gruytters est lui aussi une exception dans la musique pour carillon. Son livre le plus connu est collection majeure de musique pour carillon, dont d’innombrables copies ont été réalisées, et dont témoigne la place d’honneur que ces compositions. En effet, aux Pays-Bas, où le carillon est connu et particulièrement apprécié, on n’a quasiment retrouvé aucune trace de musique pour carillon.
De Gruytters était originaire d’Ypres, en Flandre, et naquit en 1709. En 1736 il épousa Josepha Rodriguez. Il devint en 1740, suite à un concours, carillonneur des deux carillons de la cathédrale Notre-Dame à Anvers. Jusqu’à il y a encore quelques années, la cathédrale d’Anvers présentait la caractéristique d’abriter deux carillons dans le même clocher : le carillon du Chapître, ou carillon d’église, et le carillon des fêtes ou carillon de la ville, les deux instruments ayant été fabriqués par les frères François et Pieter Hemony, noms respectés, ce qui renforça leur réputation d’excellents facteurs d’instruments de clocher. Connaissant les conditions de vie du 18e siècle, il paraît évident que cette double fonction ne suffisait pas à Joannes De Gruytters pour subvenir à ses besoins, bien qu’il y eût un nombre incroyable d’occasions où il se produisait : processions, jours de prière, célébrations… De Gruytters était en effet également violoniste et organiste de la Confrérie de la Chapelle du Saint-Sacrement de la cathédrale d’Anvers. Certains signent laissent à penser qu’il était aussi membre de l’orchestre du théâtre d’Anvers. Et comme si cela ne suffisait pas, il fut nommé à 60 ans « Maître carillonneur » par le conseil de la ville. Nous ne savons pas exactement ce que cela signifiait mais nous pensons qu’il n’était pas lui-même supposé « sonner les cloches ».Il s’agissait vraisemblablement d’une position de supervision des hommes qui devaient sonner lors des différentes occasions. Être maître carillonneur était sans doute une sinécure qui lui donnait droit à un revenu supplémentaire.